Raconter le choc de la défaite et l’humiliation de la débâcle
Le choc de la défaite
Qu’ils furent boulangers, paysans ou instituteurs, les témoins de la seconde guerre mondiale tentent aujourd’hui d’aborder le récit de leurs mémoires en nous rappelant comment cette guerre rime d’abord, pour eux, avec la notion de l’Occupation. Car le statut particulier de la France, pays non combattant, non vaincu mais soumis, a conduit les Français à vivre cette situation très particulière.
La première étape racontée est la « drôle » de guerre, une période étrange durant laquelle nous sommes officiellement en guerre contre l’Allemagne mais durant laquelle rien ne se passe. Ce fut le temps du pacifisme bêlant à la chambre des députés et ailleurs, tandis qu’un premier ministre anglais, Chamberlain, annonçait au peuple anglais, après son retour de Munich : « Mes amis, je vous apporte la paix pour cinquante ans avec l’Allemagne. » C’était en 1938, alors qu’Hitler, en pleine paix, annexait l’Autriche.
Mais en septembre 1939, Hitler envahissait la Pologne, forçant la France et le Royaume-Uni (garants de l’indépendance de la Pologne) à déclarer la guerre à l’Allemagne. Tout le monde se souvient de ce qu’il faisait ce jour-là.
Les témoins se moquent volontiers de cette période, de la prétendue invulnérabilité d’une ligne Maginot contournée en quelques heures, des uniformes de l’armée française qui datent de 14-18 ! « A ce moment, notre armée n’avait pas fière allure. Elle n’avait plus vraiment l’air d’une armée d’ailleurs. Elle évoquait plutôt une bande de boys scouts. L’ambiance était “gnan-gnan” à souhait. Quant à la philosophie générale, elle était plutôt du genre rétro. C’était l’armée sans arme, mais une armée toujours fidèle à sa montée des couleurs et à son fameux slogan : Jeunes toujours… et nous répondions prêts ! », raconte Didier Waller dans son livre autobiographique Recueil de quelques souvenirs.
L’exode représente également un passage incontournable de la seconde guerre. Certains récits sont très durs, éprouvants. Il n’aura pas fallu cinq semaines aux divisions allemandes pour désorganiser entièrement nos troupes. C’est la panique dans la population. Dix millions de personnes s’enfuient sur les routes emportant tout ce qu’elles peuvent.
Vivre sous l’occupation allemande
Pour nos clients nés dans les années 1910 et 1920, il s’agit de parler de l’arrivée des premiers soldats allemands. Les témoignages oscillent entre fascination et terreur, admiration et dégoût. Les « verts de gris » se montrent polis avec la population qui est vraiment partagée entre la honte d’en être arrivé là et une certaine forme de haine. Faire sa biographie sur cette période revient à traiter l’anecdote avec la plus grande objectivité.
Les récits de vie de cette époque relatent essentiellement la manière dont chacun a essayé de se sortir du piège de l’emprisonnement, de la privation. Comment il a fallu apprendre à éviter les embûches fatales, essayer de protéger sa famille, et bien sûr, trouver le moyen de se nourrir.
Les récits de cette période sont très différents selon que les protagonistes habitent la ville ou la campagne. Car l’on meurt nettement moins de faim dans les campagnes que dans les villes. Pour autant, la vie y est plus rude.
Le tournant de la guerre s’opère durant l’année 42. Pour autant, les gens souffrent de plus en plus. Les Alliés ont débarqué en Afrique du Nord (opération Torch). Les Allemands considèrent cette offensive comme une trahison de l’armistice de juin 1940 : ils envahissent la zone sud de l’hexagone. Tout le pays est désormais occupé. De son côté, l’armée française d’Afrique se joint aux Alliés. En Afrique du Nord, les Allemands sont alors pris en tenaille entre les Britanniques à l’est et les Franco-Américains à l’ouest. De nombreuses biographies relatent ces batailles
Les récits sur la Résistance
Rebellions et résistances
Les livres couvrant cette période de la deuxième guerre retranscrivent également de nombreuses histoires de rebellions, voire de résistance. Extrait du livre de Jean Cercellier, Au nom de la paix : « Les opérations sont plus risquées les unes que les autres et les ennemis sont méfiants et… prévoyants. Lors de l’opération qui vise à faire sauter le Viaduc d’Onville, alors que Jean, Norbert et les autres se trouvent dans les bois, prêts à agir, les Allemands, ayant renforcé ce soir-là la garde, entendent du bruit derrière les arbres et tirent plusieurs rafales en direction des bruissements de feuille. Norbert est touché à la cuisse, l’équipe de résistants rebrousse chemin. Norbert est ramené à la maison, le Dr Thiebault de Pagny-sur-Moselle vient le soigner en toute discrétion. Comme Norbert est dans l’impossibilité d’aller travailler le lendemain et comme c’est la saison des cerises, l’excuse qui est donnée, c’est que Norbert s’est cassé la jambe en tombant d’un cerisier. Ah, que le temps des cerises est douloureux ! »
Emprisonnement et déportations
Hélas, nos ouvrages relatent aussi des témoignages difficiles d’emprisonnement. Beaucoup de Français sont faits prisonniers, en Allemagne mais aussi dans Nord Pas de Calais. « Boulanger-pâtissier, c’est le métier que j’ai toujours voulu faire. Je suis en plein apprentissage, lorsque la guerre éclate. Prisonnier. Je le serai à plusieurs reprises et je passerai deux ans et six jours au camp de Buchenwald. Effroyables souvenirs. »