Quelle histoire raconte la biographie Né sous le signe du dragon
L’enfance heureuse à Hanoï
Fils de fonctionnaire au Gouvernement général, Nguyễn Bá Ngọ a vécu une enfance heureuse dans une famille protocolaire au sein de laquelle la mère s’attachait à faire de lui un homme digne et de bonne éducation. Dans ce Vietnam des années trente qui rappelle exactement le décor du dernier livre de Pierre Lemaitre, « Le Grand monde » et son fameux trafic de la piastre, les parents ne laissent pas aux enfants la possibilité de choisir leur épouse. Nguyễn Bá Ngọ a eu la chance de faire un mariage heureux, dont l’union a donné naissance à neuf enfants.L’invasion des Japonais et la guerre
Il revient notamment sur ce jour historique, à la fin de la guerre, le 9 mars 1945, où l’armée impériale japonaise, après une attaque surprise contre l’armée française, a pris le contrôle de l’Indochine. Une époque très difficile. La mauvaise récolte et les politiques de réquisition de nourriture d’abord des Français, puis de l’armée japonaise, ont causé au nord du Vietnam l’une des pires famines, faisant plus d’un million de morts.
Après avoir risqué sa vie à plusieurs reprises, au jour le jour, le héros de cette histoire ne comprend pas pourquoi il est encore de ce monde à cent ans passés ! Son esprit, vif et libre, lui aura permis de vivre une longue et belle vie, de traverser plusieurs guerres et de souffler cent cinq bougies !
Cinq extraits du livre pour comprendre ce récit de vie extraordinaire
Page 22 : « Notre père faisait preuve d’une grande exigence concernant nos résultats scolaires et je lui en suis amplement reconnaissant. Grâce à cela, je ne fais que peu de fautes en français. Je me souviens qu’il nous obligeait à faire des dictées quotidiennement. À tour de rôle, l’un de nous lisait, les deux autres écrivaient. Le soir, de retour à la maison, notre père vérifiait le nombre de dictées faites et comptait les fautes. Il n’y avait pas de punition en cas de mauvais résultat, juste la tâche sans cesse renouvelée de devoir recommencer le lendemain. »
Page 45 : « J’avais dix-huit ans, il fallait songer au mariage de raison… Ma non-contestation valant pour accord, mes parents ont organisé les fiançailles une semaine après, selon le rite traditionnel. La maison fut remplie de monde: des amis, la famille… Ce fut une belle journée festive mais je n’ai pas fait la connaissance de ma future épouse ce jour-là, tout s’est déroulé sans elle. Certainement à cause de la distance qui nous séparait. Quelque temps après, le mariage eut lieu. C’était en septembre 1935. Une grande cérémonie dans la plus pure tradition, durant laquelle je découvrais enfin celle qui allait devenir mon épouse et la mère de mes futurs enfants. Tous deux vêtus du costume traditionnel, je me souviens que le mien était de couleur vert clair. Un photographe professionnel a immortalisé cette belle journée. »
Page 64 : « Comme tout le monde, nous avons dû fuir les lieux où la guerre faisait rage, pour nous rendre à Thái Bình, à plus de cent kilomètres au sud de Hanoï, loin, très loin pour rester en vie. Nous quittions Hanoï. Nous marchions, courions avec nos cinq enfants, dont le dernier-né, Thịnh, qui avait seulement treize jours. Bien couvert dans ses langes, je le serrais très fort contre moi pour ne pas le perdre. Il n’était pas rare que les parents perdent leurs bébés, qui glissaient de leurs bras sans qu’ils s’en aperçoivent, ou encore des enfants égarés. Nous avons eu beaucoup de chance d’arriver à destination sains et saufs. Mes frères aidaient mon épouse car elle avait des difficultés à marcher après son accouchement. »
Page 88 : « Le 20 juillet 1954, les accords de Genève sont signés entre la France et le gouvernement de la République démocratique du Vietnam, actant la séparation politique du Vietnam, le Nord et le Sud, avec deux gouvernements vietnamiens : au nord le régime communiste avec Hô Chi Minh et au sud le régime soutenu par les Français et les Américains avec Ngô Đình Diệm. L’indépendance du Vietnam est en même temps reconnue. Un cessez-le-feu est décidé. Un référendum devait être organisé en 1956 en vue de la réunification politique. La guerre d’Indochine prend fin. Le pays est coupé en deux au 17e parallèle nord. L’armée française a trois cents jours pour évacuer le nord du Vietnam. »
Page 102 : « Mon épouse et notre fils aîné, Hiền, ainsi que son épouse et ses deux enfants, sont partis en avion militaire qui les a emmenés à l’île de Guam. Ils se sont ensuite établis en France, grâce à ma fille Mai et Sách, qui les avaient pris en charge dans les premiers temps. Ils ont reçu l’aide du gouvernement français et un logement. Ils se sont bien intégrés dans leur nouvelle vie. Hiền et son épouse ont rapidement trouvé du travail et les enfants ont suivi de brillantes études. »